France/Par: François Jarraud/La Source: http://www.cafepedagogique.net/

Dans un mois tout ira mieux. C’est le leitmotiv du ministre de l’éducation nationale qui a rencontré le 6 janvier les organisations syndicales. Dans un mois la crise sera passée ou atténuée. Inutile donc de prendre les mesures demandées par les personnels. Pas totalement aveugle devant la désorganisation qui s’installe dans les écoles et établissements, il allège encore le protocole. Rien ne change. Mais il confirme les masques chirurgicaux pour les enseignants, annoncés le matin par le premier ministre, et limite la “continuité pédagogique”. Les syndicats enseignants se rencontrent le 7 janvier pour une éventuelle action commune.

Deux fois plus de malades qu’en décembre

Selon le ministère sur 4 jours on compte 47 453 cas confirmés chez les élèves et 5631 chez les personnels. Des nombres qui sont nettement plus élevés que fin décembre où on comptait 50 052 élèves et 2599 personnels malades pour toute une semaine. Le ministère annonce 9202 classes fermées le 6 janvier soit 3 fois plus que la dernière semaine de cours de décembre, sans qu’on sache très bien comment le ministère définit la classe fermée. Compte tenu du protocole en vigueur, où il n’y a plus de fermeture automatique, ces classes fermées pourraient correspondre à des classes où il n’y a ni professeur i remplaçant ou à des clusters reconnus comme tels par l’ARS. Ce qui est certain c’est que les données ministérielles sont toujours en dessous de la réalité. Le ministère de la Santé indique 107 100 cas positifs entre 0 et 19 ans pour la seule journée du 3 janvier.

Les professeurs partiellement entendus

Un nouveau protocole est publié le 6 janvier. Il tient partiellement compte des demandes des enseignants sur trois points.

Conformément à ce que J Castex avait déclaré le matin, le protocole annonce des masques chirurgicaux pour “les personnels intervenant dans les écoles, collèges et lycées” qui le souhaitent “dans le courant de janvier”. Le ministère annonce en avoir commandé 55 millions. C’est un pas vers les demandes des enseignants. Mais c’est très insuffisant. D’abord parce que 55 millions de masques représentent en gros un mois d’école. Ensuite parce que les masques chirurgicaux auraient été une aide avec les variants précédents. Mais Omicron est beaucoup plus contagieux. Le ministère suivra l’avis du Haut Conseil de la Santé Publique qui sera rendu demain. Mais de lui même il n’envisage pas de doter les personnels de masque FFP2, même en maternelle, où les enfants n’ont pas de masque, même pour les AESH.

Ensuite le protocole précise ce que veut dire la continuité pédagogique. ” L’élève est informé des cours et exercices faits en classe et peut se voir communiquer les mêmes documents que ceux distribués en classe… L’enseignant veillera a minima à transmettre aux élèves absents les polycopiés distribués en classe, informera les familles sur les exercices réalisés en classe et les devoirs donnés”. Il n’est plus question de faire cours à la fois en présentiel et en distanciel. On verra si le ministre portera cet aspect du protocole auprès du public. S’il ne le fait pas les tensions avec les familles vont continuer. ” Si l’école ou l’établissement de mon enfant est fermé, le plan de continuité pédagogique de l’école ou de l’établissement est activé pour tous les élèves”. Le ministère envisage t-il que cette situation se généralise ?

Enfin, les directeurs et chefs d’établissement n’ont plus à transmettre les listes de cas contact à la CPAM.

Le protocole à nouveau allégé

Cette concession faite, le ministère allège le protocole. Cela va diminuer la désorganisation sur le terrain. Mais renforcera le risque d’épidémie. Par exemple les cas intrafamiliaux ne font plus l’objet de consignes particulières. Les enfants au contact de parents malades reviennent à l’école avant que ceux ci guérissent. Chacun peut imaginer les risques.

Quand un élève a un test J2 ou J4 positif, il n’est plus nécessaire de tester toute la classe. ” Le cycle de dépistage ne redémarre que si le second cas confirmé a eu des contacts avec les autres élèves après un délai de 7 jours suite à l’identification du premier cas”. Cela va désamorcer la demande de tests et simplifier la vie des directeurs d’école. Mais là aussi on détectera moins les malades et on luttera moins contre l’épidémie.

Les élèves et personnels ayant contracté le covid depuis moins de deux mois ne sont plus soumis à l’obligation de dépistage et de quarantaine.

Un petit effort est fait pour rendre les cantines moins risquées. ” Dans le contexte actuel de très forte circulation du virus, il est recommandé d’exploiter d’autres espaces que les locaux habituellement dédiés à la restauration (espaces extérieurs, gymnase, salles des fêtes etc.), lorsque l’étalement des plages horaires ou l’organisation de plusieurs services ne permettent pas de respecter les règles de distanciation et de limitation du brassage. Il pourra également être proposé, en dernier recours, des repas à emporter (si possible en alternant pour les élèves les repas froids, à emporter, et les repas chauds à la cantine par roulement un jour sur deux)”. De même en EPS, ” en janvier 2022, seules des activités de faible intensité compatibles avec le port du masque sont recommandées compte tenu de la très forte circulation du virus”. En février le covid aura disparu… Les collèges sont invités à remettre les stages de 3ème à plus tard. Les actions de formation continue sont de préférence repoussées.

Le nouveau protocole applique le principe d’accueil des enfants du personnel soignant de moins de 16 ans. Ils seront accueillis par groupe de 20 élèves maximum mais pourront être distribués dans les classes. ” Dès lors que les élèves sont accueillis sur présentation d’un résultat de test négatif, ils peuvent, en cas de fermeture de classe et à titre exceptionnel, être répartis dans les autres classes de l’établissement”.

Pour les élèves à besoin particulier, on revient au dispositif habituel. ” Le directeur de l’école peut mettre en place une organisation alternant temps en classe d’inscription et temps dans le dispositif. En revanche, les élèves en situation de handicap en scolarité partagée en collège et en lycée peuvent reprendre l’organisation pédagogique telle que retenue dans leur projet personnalisé de scolarisation, en veillant au respect des mesures sanitaires en vigueur”.

Les syndicats s’interrogent sur la stratégie gouvernementale

Ces décisions ont été accueillies froidement par les syndicats. “Le ministre n’entend pas l’exaspération des collègues”, nous a dit Stéphane Crochet, secrétaire général du Se Unsa. “Il y a une incompréhension de la profession sur l’objectif du gouvernement. On ne comprend pas s’il s’agit de lutter contre la diffusion du virus ou de gérer pour viser l’immunité collective”. De son coté l’Unsa éducation, dans un communiqué, déclare “ne pouvoir accepter que le gouvernement et le ministre viennent ajouter de la crise à la crise… Nous ne pouvons pas accepter le manque d’humilité et d’empathie, le décalage entre les annonces et la réalité sur les équipements de protection, sur le remplacement, sur les aménagements concernant la qualité de l’air, sur la capacité à mettre en oeuvre les mesures quelques heures après les annonces comme la délivrance d’auto-tests par les pharmacies”. Le Snalc “s’interroge sur l’objectif poursuivi”, lui aussi. Il alerte sur la tenue des épreuves de spécialité du bac et demande le report e juin, comme le Snes Fsu. ” Alors qu’on présente publiquement la situation comme grave et qu’on prend des mesures en conséquence (télétravail obligatoire, par exemple), l’École est à contre-courant de la gestion globale. Cela donne plus que jamais le sentiment que l’École est une variable d’ajustement”. Les syndicats se rencontrent le 7 janvier. “La question de la grève est posée”, nous a dit S Crochet.

Le nouveau protocole

La Source: http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2022/01/07012022Article637771354936294197.aspx